Des parents peuvent-ils s’opposer à ce qu’un médecin administre une transfusion sanguine à leur enfant mineur pour un motif religieux? Que doivent faire les médecins face à une telle situation? Comment le tribunal analyse-t-il la preuve qui lui est soumise lorsque des parents refusent de consentir à des soins requis par l’état de santé de leur enfant mineur?LES FAITS
Les parents de deux nouveaux-nés s’opposent à ce que leurs enfants reçoivent des transfusions sanguines au motif que cela irait à l’encontre de leurs croyances religieuses. Les enfants sont nés prématurément et leur état de santé nécessite des soins pour les maintenir en vie. Selon l’avis des médecins spécialistes, les transfusions sanguines font partie intégrante des soins requis par leur état de santé. Sans ces transfusions, les enfants risquent de mourir.
De leur côté, les parents ont engagé un médecin expert, lui-même témoin de Jéhovah, qui prétend qu’on pourrait traiter les enfants en leur administrant une hormone (EPO) en lieu et place des transfusions sanguines. Selon les spécialistes qui soignent les deux enfants, ce traitement n’est pas indiqué dans le présent cas.
Bien qu’ils s’opposent à l’administration de transfusions sanguines, les parents demandent néanmoins aux médecins de prendre tous les moyens pour sauver la vie de leurs deux enfants. Face à ce refus des parents de consentir aux soins requis par l’état de santé de leurs enfants, l’hôpital n’a d’autre choix que de s’adresser au tribunal.LE LITIGE
Le refus des parents de consentir à des soins requis par l’état de santé de leurs deux enfants mineurs est-il justifié ?
LA DÉCISION
La requête pour autorisation de soins est accueillie.
LES MOTIFS
La liberté de religion est un droit protégé par la Charte des droits et libertés de la personne. Cependant, le tribunal est d’avis qu’on doit passer outre aux croyances religieuses des parents dans le présent dossier. Avant toute chose, il importe de préserver la vie de même que l’intégrité des enfants et ces droits doivent avoir préséance sur la liberté de religion des parents. Au Québec, le Code civil du Québec prévoit qu’en cas de refus injustifié de celui qui peut consentir à des soins pour autrui, l’autorisation du tribunal est nécessaire. En l’espèce, le juge statue que le refus des parents de permettre l’administration de transfusions sanguines est injustifié et que cette décision n’est pas prise dans le meilleur intérêt de leurs deux enfants mineurs. Le tribunal souligne que les parents ont décidé de confier les soins de leurs enfants aux médecins spécialistes. Ce faisant, ils ne peuvent, par la suite, intervenir dans leurs plans de traitement pour des motifs religieux.
En dépit des croyances religieuses des parents, le tribunal autorise donc l’hôpital à administrer des transfusions sanguines aux deux enfants, lesquelles sont requises par leur état de santé. Sans cette intervention, ceux-ci risqueraient de mourir selon la preuve médicale présentée à l’audience.
Références
Centre hospitalier universitaire de Québec c. A.et B., Cour supérieure (C.S.) Québec, 200-17-008315-079, le 23 mai 2007, juge : Jean Bouchard, 2007 QCCS 2419; www.jugements.qc.ca
Code civil du Québec, (L.Q. 1991, c. 64), art. 16
Charte des droits et libertés de la personne, (L.R.Q., c. C-12)
Chronique juridique *
Mars
2010
Numéro
05
Texte de Le jugement dont il est question dans cette chronique a été rendu en fonction des éléments de preuves soumis au tribunal. Chaque situation est particulière. Dans le doute, nous vous suggérons de consulter un avocat de l’aide juridique. / The jugement discussed in this article was rendered based on the evidence submitted to the court. Each situation is unique. If in doubt, we suggest you consult a legal aid lawyer.
Mise à jour par Commission des services juridiques
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L'emploi du masculin pour désigner des personnes n'a d'autres fins que celle d'alléger le texte