Vous vous rendez dans un centre de glisse avec vos enfants. Lors d’une descente, vous vous blessez grièvement. Le centre de glisse est-il responsable?
LES FAITS
Durant la semaine de relâche, une femme se rend dans un centre de glisse avec ses deux enfants. Lors d’une descente, l’embarcation dans laquelle ils prenaient place s’immobilise. La dame quitte alors le raft pour le pousser. À ce moment, une autre embarcation s’approche à vive allure et la frappe de plein fouet. La dame est projetée à quelques mètres et subit de nombreuses blessures. Elle conserve par la suite une incapacité partielle permanente. Elle réclame donc 227 394,45 $ pour son incapacité, ses pertes monétaires, ses souffrances et douleurs, sa perte de jouissance de la vie, ses pertes futures ainsi que ses frais d’avocat. De son côté, le centre de glisse plaide que la dame est responsable des conséquences de l’accident puisqu’elle aurait dû rester assise dans l’embarcation. En effet, à plusieurs endroits dans l’aire de rafting on peut lire qu’il est impératif de rester assis en tout temps à l’intérieur de l’embarcation.
LE LITIGE
Le centre de glisse a-t-il pris les moyens raisonnables pour protéger ses clients contre les risques prévisibles? Est-il responsable des blessures de sa cliente?
La cliente du centre de glisse a-t-elle agi comme une personne raisonnable dans les circonstances?
LA DÉCISION
L’action en dommages et intérêts est accueillie.
LES MOTIFS
D’après la procédure du centre de glisse, une seule embarcation devait descendre la pente à la fois. Un préposé, positionné au bas de la pente, devait s’assurer que la pente était libre avant de faire signe à l’employé qui se trouvait en haut d’autoriser le départ suivant. Au moment où l’accident est survenu, le préposé affecté au bas de la pente croyait que la piste était libre et a donné le feu vert pour qu’un autre raft quitte le haut de la colline. En plus de vérifier si la piste était libre, ce dernier devait aussi contrôler les billets et répartir les personnes qui s’apprêtaient à être hissées par la remontée mécanique. Le juge affirme que la présence d’un préposé spécialement affecté à la tâche de vérifier la piste aurait grandement diminué les risques d’accident. Pour ce qui est des affiches indiquant aux usagers de ne pas quitter l’embarcation, il juge qu’elles n’étaient pas suffisantes pour assurer la sécurité des gens. Aucune consigne n’était donnée aux gens quant à la procédure à suivre dans l’éventualité où un raft s’immobiliserait sur la pente. Il est tout à fait raisonnable de prévoir qu’une personne tenterait, dans les circonstances, de pousser le raft pour dégager la voie, ce qui avait été fait à d’autres reprises dans le passé par d’autres usagers. Le juge conclu que la dame n’a commis aucune faute. C’est plutôt le centre de glisse qui n’a pas pris les moyens raisonnables pour protéger ses clients contre les risques prévisibles. Il accorde donc 122 135 $ à la mère en dommages et intérêts. Par contre, il ne lui accorde pas le remboursement de ses frais d’avocats puisqu’il n’y a pas eu d’abus de droit de la part du centre de glisse qui justifierait d’accorder cette réclamation.
RéférencesBertrand c. 2151-8378 Québec inc. (Pente des pays d’en haut) Cour supérieure (C.S.) Beauharnois 760-05-003893-011, 24 janvier 2005,
juge : Pierre Béliveau (J.E. 2005-420; www.jugements.qc.ca)